lettres patentes leur permirent
de s'établir au nombre de 450 familles, à condition qu'ils demeureraient
séparés des citoyens, et qu'il serait levé sur la communauté une somme de
20 000 livrés.
L'effet des lettres patentes devant cesser en 1745 , elles furent renouvelées
eu faveur de M. Brancas-Lauraguais pour son mariage. M. Lauraguais fit proroger
jusqu'en 1800 ce droit de protection. Le motif du roi pour cette nouvelle
faveur, est de donner à M. Brancas une nouvelle marque de bienveillance et
de satisfaction Le droit de protection peut-il subsister, soit au profit
du concessionnaire, soit au profit du domaine, c'est-à-dire au profit de
la nation ? Doit-il être supprimé sans indemnité au concessionnaire ? Voilà
ce qu'il faut examiner. C'est un droit, selon M. Brancas , représentatif
du droit d'aubaine. Selon les Juifs, il est une suite de nos fois qui condamnent
à la servitude cette nation. Vous n'avez rien prononcé sur le droit d'aubaine
: il est aisé d'en prévoir le sort; mais fût-il détruit, il faudrait encore
que les Juifs payassent les droits concédés à la maison Brancas. La qualité
d'étranger est un vice attaché à l'individu, qui s'efface pour les descendants.
A l'époque où ce droit fut créé, les Juifs n'étaient plus étrangers : ils
prétendent avoir été établis à Metz avant que cette ville passât sous la
domination française. Si l'on veut qu'ils soient considérés comme étrangers,
quels sont les actes qui le constatent ? Les domaines les plus fiscaux ne
les regardent pas comme tels. Les Juifs forment une corporation : ce n'est
pas comme étrangers qu'ils ont sollicité des lettres patentes, c'est comme
corporation. Il n'y a peut-être pas d'exemple d'un nombre d'hommes autorisés
à se former en corporation au milieu d'une société qui les méconnaît. Il
existait des droits de protection dans le régime féodal , et vous ne les
avez pas distingués du droit de servitude. Peut-on mettre en question si
l'on doit des indemnités pour la suppression d'un pareil droit ? C'est prostituer
la force publique que d'en vendre la protection à ceux qu'elle doit garantir.
M. Brancas se soumet à votre décision, quelle qu'elle soit, et il demande
à subir le même sort que les pensionnaires. Le comité croit qu'il est de
la dignité de l'Assemblée de l'assimiler en tout à cette classe de citoyens;
son age , ses services, réclament eu sa faveur. Le titre de sa jouissance
vous paraîtra peut-être devoir aussi entrer en considération. Le comité des
domaines vous présente le projet de décret suivant:
"L'Assemblée nationale , après avoir entendu son comité des domaines,
a décrété et décrète qu'à compter du jour de la publication du présent décret,
la redevance annuelle de 20 000 livres levée sur les Juifs de Metz et du
pays Messin , sous la dénomination de droit d'habitation , protection
et tolérance , est et demeure supprimée et abolie sans aucune indemnité
pour le concessionnaire et possesseur actuel de ladite redevance.
Décrète en outre que les redevances de même nature qui se lèvent partout
ailleurs sur les Juifs, sous quelque dénomination que ce soit, sont pareillement
abolies et supprimées es sans indemnité de la part des débiteurs, soit que
lesdites redevances se perçoivent au profit du trésor public , on qu'elles
soient possédées par des villes , des communautés ou des particuliers; sauf
à statuer, ainsi qu'il appartiendra, sur les indemnités qui pourront. être
dues par la nation aux concessionnaires, à titre onéreux, d'après l'avis
des directeurs de départements dans le territoire desquels lesdites, redevances
se perçoivent, à l'effet de quoi les titres leur en seront représentés dans
l'année par lesdits possesseurs et concessionnaires.
Décrète enfin qu'il ne pourra être rien exigé pour raison des arrérages
de ladite redevance, et que toutes poursuites qui pourraient être exercées
pour raison d'icelles, sont et demeurent éteintes.
M. REWBELL : Si te comité des domaines s'était borné à la faveur singulière
qui avait été accordée a la famille Brancas, je ne prendrais pas la parole;
mais le projet de décret qu'on vient de lire présente une question constitutionnelle
qui ne devrait pas être mise à la discussion à dix heures du soir, et qui,
sans doute est bien digne d'une Assemblée complète et d'une séance du matin.
Après plusieurs observations
sur la nécessité d'un ajournement , le décret présenté par le comité des
domaines est adopté
La séance est levée à 10 heures et demie.
SEANCE du MERCREDI 21 JUILLET.
On fait lecture du procès-verbal de la séance de la veille au soir.
M. REWBELL : L'Assemblée nationale a décrété hier que les Juifs d'Alsace
ne paieraient plus le droit connu sous le nom de droit d'habitation ,
protection et tolérance , et que quand bien même il y aurait des contraintes
de faites, elle les abolissait. J'observe que les Juifs ne paient pas d'autres
impositions. Si c'est l'intention de l'Assemblée de les décharger entièrement,
j'y consens.
M. DUPONT : On lient mettre dans l'article : A la charge d'acquitter les
impositions comme les autres citoyens.
M. REWBELL . : Un moment : ne préjugez pas une question qui mérite une
discussion sérieuse .
M. REGNAULT , député de Saint-Jean-d'Angely : Ne perdons pas le temps
à une discussion qui est étrangère à l'ordre du du jour. Les Juifs doivent,
comme tous les individus, acquitter les impôts, et payer en outre leur part
pour prix de la protection que leur accorde la loi. Je demande le renvoi
au comité des finances,
M. DUMETZ : Il faut examiner quel serait leur sort, s'ils n'étaient pas
Juifs; ils ne possèdent pas d'immeubles; ils ne paient pas d'impositions;
cela est tout simple. N'est-ce pas un honneur, que montrer de l'indignation
coutre un droit perçu sur des hommes comme sur des objets de commerce ? Ainsi
qu'on l'a dit hier, il doit être frappé d'anathème.
L'Assemblée adopte la proposition
de M. Regnault.
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Source : Bulletin des lois
Arrêté : - relatif à la liquidation et au paiement des dettes des Juifs de
la ci-devant Alsace
- à la liquidation des dettes de la ci-devant communauté des
Juifs de Metz
- prescrivant de nouvelles mesures pour faire acquitter la Dette
des Juifs de la ci-devant Alsace.
- sur le mode de liquidation des Dettes de la ci-devante communauté
des Juifs du Monferrat