L’auteur de ce mémoire
attribue les retards qu’a éprouvé jusqu’à
présent la régénération civile des juifs
à deux causes principales qui sont :
1°
Les empêchements et les obstacles que les juifs rencontrent de
la part du gouvernement et de leurs concitoyens
2° Les pratiques intérieures qui sont en usage parmi les
juifs.
Les abus qui résultent de ces
principes sont développés dans les deux chapitres dont
on va présenter l’analyse.
Beer
propose pour les détruire d’adopter un projet de décret
qui y fait suite.
Chapitre 1er
1- La loi du 18 germinal an 10 n’a rien
fait par rapport à l’organisation de la religion juive,
a empêché que les individus qui la professent aient fait
un pas vers leur régénération civile ; elle ne
statue point sur leurs assemblées, sur l’ordre
hiérarchique de leurs chefs religieux. Il en est résulté
que les juifs entre eux n’ont pas changé d’état
; ils n’ont pu se réunir puisque aucun d’entre
n’avait le droit de convoquer ses coreligionnaires. Cette
simple tolérance du culte juif ne l’a pas mis au rang de
ceux qui sont professés en France. Il a été
(commis ?) par le passé l’objet du mépris du
vulgaire et dans l’impuissance de rien entreprendre, on demande
qu’avant tout il soit organisé à l’instar
des religions chrétiennes, que le Gouvernement lui accorde la
même protection.
2- Le mot Juif , emporte
avec lui une idée de dédain et de mépris de la
part de tout ce qui est chrétien, il est presque un épithète
injurieux et c’est peut-être une des causes qui tendent
sans cesse à éloigner les enfants d’Israël
de tout sentiment de fraternité envers les catholiques. On
propose de les nommer selon la Bible Israélites ou Hébreux.
Ce changement produirait peut-être un bon effet et
contribuerait à les tirer de l’avilissement dont ils
sont couverts.
Chapitre 2ème
1- La bienfaisance qui s’exerce envers
les juifs vagabonds devient un grand abus, elle encourage la
fainéantise et le vice ; on propose de faire exécuter
vigoureusement à leur égard les lois sur la mendicité.
En refusant toute espèce de charité à l’homme
capable de travailler, le besoin lui fera bientôt retrouver des
facultés qu’il emploiera utilement pour la société
et à laquelle elles n’étaient qu’à
charge.
2 - L’avarice et l’usure
sont des vices dont les Juifs ne peuvent s’excuser, mais cette
soif de l’argent est fondée sur un principe bien ancien
et que les droits qu’ils ont acquis dernièrement n’ont
pas encore déraciné ; en effet, ils étaient sans
cesse exposés à être injustement dépouillés
; ils devaient donc avoir toujours des ressources assez considérables
pour pouvoir fuir à la première persécution. Le
temps qui s’est écoulé entre leur esclavage et
leur liberté n’est pas assez considérable pour
qu’ils aient pus apprécier ce qu’on a fait pour
eux.
3 - Les Juifs sont fort ignorants. Ils ne
reçoivent d’autres principes religieux que ceux que
leurs parents professent eux-mêmes par routine. Ils n’ont
ni instituteur ni fondation religieuse ; il faut donc les forcer dans
chaque circonscription de deux ou trois départements, à
se réunir pour faire une masse de cotisations soit volontaires
soit contraintes afin d’entretenir un établissement
d’Instruction publique.
4 - Les rabbins
sont pauvres, ils n’ont point de salaire fixe ; ils sont
obligés, dans cet état, de se conduire avec des
ménagements qui déshonorent le caractère dont
ils sont revêtus. Le Gouvernement, en subvenant à leur
traitement, les rendrait plus indépendant et plus à
même d’opérer les changements que l’on veut
faire subir au peuple juif.
Si les enfants
mâles des Juifs se marient vers l’âge de 14 ou 15
ans, le Gouvernement devrait proscrire cette coutume qui contrarie
les conscriptions militaires et qui nuit aussi à leur
éducation.
Tels sont les abus
auxquels on propose de remédier par une loi organique dont on
va donner l’extrait
Extrait du Projet de loi
La circonscription pour le culte Israélite
sera la même que pour le culte catholique.
Tous les Israélites établis en France dépendront
de la synagogue qui sera établie dans le chef lieu de leur
arrondissement respectif.
Ils seront tenus de
contribuer aux frais du culte.
Aucun israélite
ne pourra s’établir sans que préalablement il se
soit fait inscrire sur le registre du rabbin de l’arrondissement
dans lequel il voudra demeurer.
A chaque
synagogue principale d’un arrondissement sera attachée
une administration centrale qui portera le nom de nassistoire . Cette
administration sera composée d’un chef, de deux adjoints
et d’un receveur général. Le rabbin en chef aura
voix consultative. Le chef portera le nom de Nassie.
Ils seront nommés à la pluralité des voix et
sortiront par tiers.
Ce conseil formera les
budgets de l’arrondissement quant aux dépenses du
culte.
Il fera surveiller la police intérieure
des synagogues.
Il organisera et administrera
le séminaire.
Il en nommera les
professeurs.
Il dressera à la fin de
chaque année un compte administratif qui sera présenté
au conseil nassistorial.
Le conseil
nassistorial se compose des plus riches chefs de famille de
l’arrondissement.
Il n’est assemblé
que pendant 15 jours dans l’année.
Il vérifie toutes les opérations du nassistoire et il
arrête le budget.
Source: Centre Historique des Archives Nationales F/19/11004 et 11005