Napoléon, Empereur des Français, Roi d'Italie, Protecteur de la Confédération du Rhin, Médiateur de la Confédération suisse ;

    Sur le rapport de notre ministre de l'intérieur ;
    Vu la demande en naturalisation formée par plusieurs juifs nés hors de la ci-devant Toscane, et admis dans la communauté des juifs de Livourne par délibération des prud'hommes de la nation juive, antérieurement à la réunion de la Toscane à la France,
    Le statut de Ferdinand II, grand-duc de Toscane, en date du 10 juin 1593, introductif de certains privilèges en faveur des juifs qui s'établiraient à Pise ou à Livourne,
    Diverses attestations touchant l'extension progressive de ces privilèges à l'égard des juifs domiciliés à Livourne et admis par délibération des prud'hommes,
    Et enfin un acte de notoriété émané du tribunal de première instance de Livourne, portant, qu'il est vrai et notoire que les juifs qui venaient habiter la ville de Livourne sous les anciens gouverneurs de la Toscane, aussitôt qu'ils avaient été balottés et admis par les prud'hommes et gouverneurs de la nation juive, acquéraient la naturalisation et les droits des sujets toscans, et jouissaient de tous les droits civils et privilégiés accordés aux habitants de la ville de Livourne ; qu'ils pouvaient être admis à exercer les fonctions de courtiers publics ; qu'un des susdits individus, après l'époque du 20 mars 1780, siégeait en costume chaque année, tant dans la magistrature que dans le conseil général de la commune de Livourne, avec voix délibérative, et jouissait du même rang et des mêmes honoraires que les autres membres du conseil sans aucune différence ; qu'ils étaient exempts, même les individus non négociants, des droits sur les actes qu'ils passaient avec les autres habitants de la ville de Livourne ; qu'ils obtenaient les passe-ports en la qualité de sujets toscans, et avaient du crédit à la douane ;

    Considérant que toute demande en naturalisation particulièrement formée par des juifs balottés et admis à Livourne par les prud'hommes de la nation juive, avant la réunion de la Toscane à l'Empire, se confond dans la question générale de savoir si, par l'effet du balottage effectué dans les formes usitées, les juifs nés à l'étranger acquéraient à Livourne la qualité de sujets toscans ;
    Que ce point de fait est constant, et que si ce mode de naturalisation inconnu ailleurs ne doit point se reproduire à l'avenir, il est néanmoins juste d'en conserver les avantages à ceux qui les avaient acquis avant la réunion, et qui, pour la plupart, sont à la tête des principales maisons de commerce de la ville de Livourne ;
    Notre Conseil d'état entendu,

    Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :
    Art. 1er Les juifs qui, nés en pays étranger, étaient établis à Livourne, et y avaient été balottés et admis par les prud'hommes de la nation juive lors de la réunion de cette ville à notre Empire, jouiront, sans nouvelle lettre, des droits et de la qualité de citoyens français.
    2° Le registre de balottage tenu par les prud'hommes de la nation juive à Livourne sera incessamment remis à notre préfet de la Méditerranée, pour être par lui clos et arrêté.
    3° A l'avenir, nul étranger, juif ou autre, ne pourra devenir sujet français que d'après les règles établies par les lois générales de l'Empire.
    4° Notre ministre de l'intérieur est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera inséré au Bulletin des lois.


Source: Bulletin des lois