29 novembre 1806
|
§1
Pour marcher d'une manière régulière, il faudrait commencer
par déclarer qu'il y a dans les Lois de Moyse des dispositions religieuses
et des dispositions politiques;
Que les dispositions religieuses sont immuables; mais qu'il n'en est
pas de même des dispositions politiques qui sont susceptibles de modifications;
Que c'est le Grand Sanhédrin qui seul peut établir cette distinction:
Que pendant tout le temps où les Israélites sont restés dans la Palestine
et formaient corps de nation, les circonstances politiques étant les mêmes
que du temps de Moïse, les Grands Sanhédrins n'ont point été dans le cas
de faire cette distinction;
Que depuis que les Israélites ont quitté leur Patrie, il n'y a plus de
Grand Sanhédrin.
Après la déclaration de ces principes, en viendra l'application.
1° La polygamie était permise; elle doit cesser de l'être aux Juifs qui
se sont répandus dans l'occident, tandis qu'elle le peut être encore à ceux
de l'orient, en considération de la situation particulière dans laquelle
ils se trouvent.
2° Selon la loi de Moïse, les Juifs ne regardaient comme leurs frères
que ceux qui professaient la même religion. Cela devrait être, lorsque le
peuple juif était environné de peuple idolâtres qui avaient juré une haine
commune aux enfants d'Israël. cela peut cesser d'être quand cette situation
a changé et c'est ce que le sanhédrin établira en décidant qu'il doit considérer
comme frères tous les hommes, quelque religion qu'ils professent, s'ils ne
sont pas idolâtres, et si les Israélites jouissent au milieu d'eux des mêmes
droits qu'eux-mêmes.
3° Cette fraternité étant établie, il en doit résulter l'obligation de
défendre le pays où les Israélites jouissent des mêmes droits que les autres
citoyens, de même que selon la loi de Moise, ils devraient défendre le temple
de Jérusalem. Le sanhédrin doit en faire une loi positive.
4° De la doctrine qui établira que les Juifs doivent considérer les chrétiens
comme frère, il résultera non seulement que les mariages entre Juifs et Chrétiens
ne sont point anathème, mais la nécessité de les recommander parce qu'ils
importent au salut de la nation.
5° et 6° La répudiation et le mariage doivent être assujetti à l'observation
des formalités prescrites par le Code Napoléon.
7° et 8° Les explications sur le prêt à intérêt à peu près telles qu'elles
sont établies dans le projet, dérivent également de la fraternité reconnue.
9° Les professions utiles. Ajouter aux dispositions de la décision proposée
une invitation à devenir propriétaire.
10° Enfin une obligation de la propriété.
Toutes ces décisions appartiennent au Grand sanhédrin, et c'est seulement
de cette partie dogmatique que le travail présenté par le Ministre fait mention.
§2
Des dispositions d'organisation et de discipline doivent
aussi être prises, et elles paraissent appartenir à l'Assemblée générale.
Ainsi l'Assemblée générale déterminera :
1° L'organisation de Sanhédrin ou de Consistoires administratifs par
arrondissements et par départements, et celle d'un sanhédrin ou Consistoire
central et les attributions de ces institutions qui doivent exercer une police
sévère sur les rabbins;
2° Le nombre des rabbins, la manière dont ils seront payés, leurs obligations
et leurs attributions.
3° Les conditions nécessaires pour être autorisé à faire le commerce,
et la manière dont cette autorisation sera donnée, sous l'approbation de
l'autorité locale.
4° La prohibition de toute espèce de commerce du droit de tirer des lettres
de change, de l'exercice du brocantage, de la faculté d'avoir boutique à
tout individu qui ne sera pas pourvu de l'autorisation ci-dessus.
5° La prohibition pendant dix à tous les israélites qui ne prouveraient
pas qu'ils possèdent en France des biens fonds, de la faculté de prêter sur
hypothèque, et l'autorisation aux propriétaires de fonds, en limitant la faculté
de prendre hypothèque à une somme égale à la valeur des fonds qu'ils possèdent.
6° L'obligation dans chaque département ou arrondissement
de Sanhédrin ou Consistoire de n'autoriser sur trois mariages que deux mariages
entre Juifs et Juives et un mariage mi-partie entre Juif et Chrétien;
Il est ajouté en marge :
Si cette disposition paraît d'une exécution trop difficile, il faut
prendre des mesures d'invitation, d'instruction, d'encouragement, de commandement,
qui puissent conduire à ce but.
7° L'obligation de fournir une quantité de Conscrits proportionnée à
la population israélite, sans qu'il puisse y avoir de remplacement d'un israélite
si ce n'est par un autre israélite.
D'autres dispositions pourraient être prescrites; mais elles viendront
ensuite.
§3
Parmi celles établies ci-dessus, il en est plusieurs
qui sont non seulement de discipline mais encore de législation et pour lesquelles
le Concours du Conseil d'Etat est nécessaire.
Ainsi, le Grand Sanhédrin expliquant les dispositions politiques de la
loi de Moïse, prescrirait comme dogme les objets qui se trouvent dans son
ressort.
L'Assemblée générale des Israélites faisant une sorte de convention avec
l'administration et, en considération des avantages que la Révolution a accordé
aux Juifs, prescrirait les dispositions d'organisation et de discipline.
Enfin le Conseil d'Etat ferait les règlements nécessaires pour l'exécution
des dispositions et des prohibitions indiquées ci-dessus.
Il y a dans tout ceci un mélange de dogmes, de discipline, de législation,
d'où résulte la nécessité d'un grand Sanhédrin, d'une assemblée générale
des israélites et d'un concours mutuel de l'autorité des Juifs entr'eux et
de l'autorité publique.
Il faut beaucoup de réflexion et de discernement pour distinguer d'une
manière précise ce qui doit appartenir dans ce plan au grand Sanhédrin, à
l'assemblée générale et au Conseil d'Etat.
Si un sénatus Consulte était nécessaire on n'y verrait pas de difficulté;
mais il ne serait pas possible de procéder au moyen d'une loi, attendu qu'il
s'agit d'arriver par des dispositions civiles à des résultats politiques.
§4
Le principal but qu'on s'est proposé a été de protéger
le peuple français, de venir au secoure des campagnes et d'arracher plusieurs
départements à l'opprobre de se trouver vassaux des Juifs; car c'est un véritable
vasselage que l'hypothèque d'une grande partie des terres d'un département
à un peuple qui, par ses moeurs ou ses lois, formait une nation particulière
dans la Nation. C'est ainsi que dans des terres fort rapprochées de nous,
la main-morte menaçant de s'emparer du territoire, on fut obligé d'opposer
des obstacles à son progrès. De même, la Suzeraineté des Juifs s'étendant
sans cesse au moyen de l'usure et des hypothèques, il devient indispensable
d'y mettre des bornes.
Le second objet est d'atténuer, sinon de guérir la tendance du peuple
Juif à un si grand nombre de pratiques contraire à la civilisation et au
bon ordre de la Société dans tous les pays du monde.
Il faut arrêter le mal en l'empêchant; il faut l'empêcher en changeant
les Juifs.
L'ensemble des mesures proposées doit conduire à ces deux résultats.
Lorsque sur trois mariages il y en aura un entre Juif et Français, le
sang des Juifs cessera d'avoir un caractère particulier.
Lorsqu'on les empêchera de se livrer exclusivement à l'usure et au brocantage,
ils s'accoutumeront à exercer des métiers; la tendance à l'usure disparaître.
Lorsqu'ils ne pourront obtenir d'hypothèque qu'en possédant eux-même des
propriétés, ils deviendront propriétaires.
Lorsqu'on exigera qu'une portion considérable de la Jeunesse aille aux
armées, ils cesseront d'avoir exclusivement des intérêts et des sentiments
Juifs; ils prendront des intérêts et des sentiments français.
Lorsqu'on les soumettra aux lois civiles, il ne leur restera plus comme
Juifs que des dogmes, et ils sortiront de cet état où la religion est la
seule loi civile, ainsi que cela existe chez les musulmans, et comme cela
a toujours été dans l'enfance des Nations.
C'est en vain que l'on dirait qu'ils ne se sont avilis que parce qu'ils
sont vexés en Pologne, où ils sont nécessaires pour remplacer la classe intermédiaire
de la société, où ils sont considérés et puissants, ils n'en sont pas moins
vils, mal-propres et portés à toutes les pratiques de la plus basse improbité.
Les spéculateurs proposeraient sans doute de se borner à introduire des
améliorations dans leur législation; mais cela serait insuffisant. le bien
se fait lentement et une masse de sang vicié ne s'améliore qu'avec lenteur.
cependant les peuples souffrent. Ils crient et l'intention de S. M. est de
venir à leur secours.
Il faut user concurremment de deux moyens,
dont l'un est d'arrêter l'incendie et l'autre de l'éteindre.
De là la nécessité d'employer en même temps le Grand Sanhédrin, l'Assemblée
générale des Juifs et les dispositions réglementaires qui seront délibérées
par le Conseil d'Etat.
Le Grand Sanhédrin a pour lui les voeux et l'opinion de tout ce qu'il
a d'éclairer parmi les Juifs de l'Europe. Avec cet appui, il est le maître
de supprimer de la législation de Moïse les lois qui sont atroces et celles
qui n'appartiennent qu'à la situation des Juifs dans la Palestine.
|
Source: Centre Historique des Archives Nationales F/19/11004 et 11005