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Art. 1er. A compter de la publication du présent décret,
le sursis prononcé par notre décret du 30 mai 1806,
pour le paiement des créances des juifs, est levé.
2. Lesdites
créances seront néanmoins soumises aux dispositions
ci-après.
3. Tout engagement
pour prêt fait par des juifs à des mineurs, sans
l'autorisation de leur tuteur; à des femmes, sans
l'autorisation de leur mari, à des militaires, sans
l'autorisation de leur capitaine si c'est un soldat ou sous-officier,
du chef de corps si c'est un officier, sera nul de plein droit, sans
que les porteurs ou cessionnaires puissent s'en prévaloir, et
nos tribunaux autoriser aucune action ou poursuite.
4. Aucune lettre de change, aucun billet à ordre, aucune
obligation ou promesse, souscrits par un de nos sujets non
commerçant, au profit d'un juif, ne pourra être exigé
sans que le porteur prouve que la valeur en a été
fournie entière et sans fraude.
5.
Toute créance dont le capital sera aggravé d'une
manière patente ou cachée, par la cumulation d'intérêts
à plus de cinq pour cent, sera réduite par nos
tribunaux.
Si l'intérêt réuni au capital
excède dix pour cent, la créance sera déclarée
usuraire, et, comme telle, annulée.
6. Pour les créances légitimes et non usuraires,
nos tribunaux sont autorisés à accorder aux débiteurs
des délais conformes à l'équité.
TITRE II
7. Désormais,
et à dater du ler juillet prochain, nul juif ne pourra se
livrer à aucun commerce, négoce ou trafic quelconque,
sans avoir reçu, à cet effet, une patente du préfet
du département, laquelle ne sera accordée que sur des
informations précises, et que sur un certificat :
- 1° du conseil municipal, constatant que ledit juif ne s'est
livré ni à l'usure, ni à un trafic illicite,
- 2° du consistoire de la synagogue dans
la circonscription de laquelle il habite, attestant sa bonne conduite
et sa probité.
8. Cette patente
sera renouvelée tous les ans.
9. Nos
procureurs généraux près nos cours sont
spécialement chargés de faire révoquer lesdites
patentes, par une décision spéciale de la cour, toutes
les fois qu'il sera à leur connaissance qu'un juif patenté
fait l'usure, ou se livre à un trafic frauduleux.
10. Tout acte de commerce fait par un juif non patenté
sera nul et de nulle valeur.
11. Il en
sera de même de toute hypothèque prise sur des biens par
un juif non patenté, lorsqu'il sera prouvé que ladite
hypothèque a été prise pour une créance
résultant d'une lettre de change, ou pour un fait quelconque
de commerce, négoce ou trafic.
12.
Tous contrats ou obligations souscrites au profit d'un juif non
patenté, pour des raisons étrangères au
commerce, négoce ou trafic, pourront être révisés
par suite d'une enquête de nos tribunaux. Le débiteur
sera admis à prouver qu'il y a usure ou résultat d'un
trafic frauduleux, et, si la preuve est acquise, les créances
seront susceptibles, soit d'une réduction arbitrée par
le tribunal, soit d'annulation, si l'usure excède dix pour
cent.
13. Les dispositions de l'article
4, titre ler , du présent décret, sur les lettres de
change, billets à ordre, etc., sont applicables à
l'avenir comme au passé.
14. Nul
juif ne pourra prêter sur nantissement à des domestiques
ou gens à gages, et il ne pourra prêter sur nantissement
à d'autres personnes, qu'autant qu'il en sera dressé
acte par un notaire, lequel certifiera dans l'acte, que les espèces
ont été comptées en sa présence et celle
des témoins, à peine de perdre tout droit sur les
gages, dont nos tribunaux et cours pourront en ce cas ordonner la
restitution gratuite.
15. Les Juifs ne
pourront, sous les mêmes peines, recevoir en gage les
instruments, ustensiles, outils et vêtements des ouvriers,
journaliers et domestiques.
TITRE III
16. Aucun juif non actuellement
domicilié dans nos départements du Haut et du Bas-Rhin
ne sera désormais admis à y prendre domicile.
Aucun
juif non actuellement domicilié ne sera admis à prendre
domicile dans les autres départements de notre empire, que
dans le cas où il y aura fait l'acquisition d'une propriété
rurale, et se livrera à l'agriculture, sans se mêler
d'aucun commerce, négoce ou trafic.
Il pourra être
fait des exceptions aux dispositions du présent article, en
vertu d'une autorisation spéciale émanée de
nous.
17. La population juive, dans nos
départements, ne sera point admise à fournir des
remplaçants pour la conscription : en conséquence, tout
juif conscrit sera assujetti au service personnel
Dispositions
générales.
18. Les
dispositions contenues au présent décret auront leur
exécution pendant dix ans, espérant qu'à
l'expiration de ce délai, et par l'effet des diverses mesures
prises à l'égard des juifs, il n'y aura plus aucune
différence entre eux et les autres citoyens de notre empire;
sauf néanmoins, si notre espérance était
trompée, à en proroger l'exécution, pour tel
temps qu'il sera jugé convenable.
19. Les juifs établis à Bordeaux et dans les
départements de la Gironde et des Landes, n'ayant donné
lieu à aucune plainte, et ne se livrant pas à un trafic
illicite, ne sont pas compris dans les dispositions du présent
décret.
20. Les ministres sont
chargés de l'exécution du présent décret.
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Source: Bulletin des lois