Ministère des cultes
Rapport
A sa majesté l’Empereur

Sire

     Dès l’aurore de la Révolution française, tous les vœux se réunirent en faveur de la Liberté des Cultes.
     Cette liberté fut décrétée par une loi de l’assemblée constituante du 7 mai 1791, sanctionnée le 18
     L’assemblée législative et la convention nationale adoptèrent ce principe depuis consacré par les décrets de Votre Majesté.
     Enfin la loi salutaire et régénératrice qui a préparé et disposé la grande Époque à laquelle l’Empire français est heureusement arrivée; La loi du 18 Germinal a servi de clef à la voûte de l’Édifice religieux en France.
     Le catholiques et le protestants sont les sujets uniques de cette Loi .
     Si cette loi n’a rien statué sur les Juifs, ce n’est ni par oubli, ni par indifférence pour les individus, parce que nul Citoyen, en France, n’est indifférent au Chef suprême de l’État, comme je l’ai exposé dans le discours de présentation de la Loi, c’est parce que les Juifs forment moins une secte qu’un peuple à part qui ne s’est jamais confondu civilement, ni religieusement avec aucun autre peuple.
     Mais quoique le législateur n’ait pas dû s’occuper du Culte des Juifs, les individus qui sont en France n’en sont pas moins rangés dans la classe des citoyens français, et sous ce  rapport, s’ils ont droit à la protection, à la sollicitude du gouvernement, ils doivent nécessairement être assujettis à sa surveillance.
     C’est sous ce rapport que les Juifs répandus dans l’Empire français, sollicitent la bienveillance et l’appui de Votre Majesté.
 La Révolution française a influé sur les Juifs comme sur les Chrétiens ; leur Discipline est méconnue ou méprisée, et le plus grand désordre règne dans leurs assemblées.
     Plusieurs Juifs se plaignent de l’Esprit d’anarchie qui y règne, et plusieurs Préfet m’ont fait sentir la nécessité de faire des Règlements sages pour les contenir et ramener l’ordre parmi eux.
     Le Gouvernement est donc intéressé à  concourir au rétablissement de la Discipline religieuse des Juifs, parce que toute Discipline est une mesure d’ordre, et que de l’ordre partiel et pour ainsi dire domestique, résulte nécessairement l’ordre public, et l’heureuse harmonie du tout dans un vaste Empire.

     D’après ces considérations, j’ai pensé qu’il serait utile d’autoriser les rabbins et les syndics des Juifs à présenter à leurs Préfets respectifs les projets de règlements qu’ils croiront la plus propre à ramener l’ordre et la paix parmi eux, et de m’autoriser à inviter les Préfets à joindre leurs observations à ces projets, pour que d’après ces matériaux je puisse proposer à la sanction de Votre Majesté, les mesures qui me paraîtront les plus relatives au bien public.
 
  Source: Centre Historique des Archives Nationales F/19/11004 et 11005